Transition: l'affaire de tous !

30 mai 2011

L’avenir qui se dessine présente deux caractéristiques majeures dont nous devons absolument tenir compte dans notre manière d’aborder les choses. D’une part, tout le monde sera impacté, qu'il s’agisse des citoyens, des entreprises (petites et grandes),  des élus ou des associations. D’autre part, le changement sera difficile et fera donc appel aux moyens, à l’intelligence et aux compétences de tout le monde.

C’est pourquoi j’insiste en permanence sur l’absolue nécessité du rassemblement et de la reconstruction du lien social.

 

lien-social.jpgsource image: agglo.morlaix.fr

Plusieurs décennies de modernisation ont fini par fragmenter ces liens, générant individualisme et repli sur soi. De manière caricaturale, si vous avez le pouvoir d’achat, vous pouvez (sur)vivre, même sans aucun lien avec des voisins, des amis ou de la famille. Je parle bien de vivre au sens physiologique car il est évident que la solitude ne permet pas une vie équilibrée et saine. En revanche, dans un monde où le pouvoir d’achat va diminuer, ainsi que la disponibilité des services et les importations diverses, nous avons absolument besoin des autres, c’est une nécessité vitale.

Une société dont les citoyens ne sont pas solidaires est une société qui risque le conflit dès lors que se présentent les difficultés. C’est pourquoi, la transition ne doit surtout pas être une question de parti, de couleur, de religion, de classe ou statut social, de génération … La transition est l’affaire de tous !

Les citoyens

Les citoyens en tant que personnes et sans aucune distinction sont à la base de tout. Or, s'ils ne prennent pas conscience de l’absolue nécessité de changer les modes de vie, non pas par choix militant mais parce que c’est inévitable, alors la société ne pourra que subir. Les citoyens doivent comprendre POURQUOI le modèle actuel est terminé et pourquoi il est illusoire d’imaginer que tout pourra continuer ainsi sur un modèle de croissance, de haute technologie, de centralisation et de mondialisation.

Sans cette compréhension du problème, seule une minorité de personnes pourra percevoir la nécessité du changement et nous irons dans le mur. C’est pourquoi il faut informer, expliquer, démontrer avec force et conviction le fait que nous avons atteint les limites des capacités de croissance, c'est mathématiquement certain.

 

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La créativité et l’énergie qui peuvent naître de l’émulation collective sont immenses et il faut favoriser, tout de suite et partout, l’émergence de ces mouvements citoyens qui vont reprendre leur vie en main.

Quelques objectifs pour les citoyens:

  • briser le rêve de LA solution miracle qui viendrait résoudre tous nos problèmes sans rien changer (ou presque) à nos modes de vie. C’est techniquement et scientifiquement démontrable et c’est ce que je fais dans mes conférences.
  • redonner de l’importance à l’action collective. Nous devons cesser de nous focaliser uniquement sur les actions individuelles (ampoules basse consommation, tri des déchets …) et admettre que seule l’action collective permettra des changements à l’échelle des enjeux.
  • une fois le constat accepté et malgré l’ampleur du défi, il est indispensable que chacun puisse se construire une vision positive de l’avenir. "Si je tiens compte de la réalité, dans quelle société je veux vivre dans 20 ans, 30 ans ?" C’est à partir de cette vision qu’il sera possible de se fixer des objectifs et d’aller de l’avant.
  • passer à l’action, se réunir sans attendre qu'on nous le demande, organiser des groupes de travail, rassembler idées, savoirs, outils et compétences pour impulser un grand mouvement de transition.

Les associations

Il ne faut pas réinventer ce qui existe déjà. Les acteurs associatifs sont très impliqués dans la vie locale et rassemblés autour de thématiques spécifiques (alimentation, sport, culture …).

De nombreuses initiatives existantes vont déjà dans le sens de la transition (AMAP, covoiturage, partage de savoir, protection de l’environnement …) sans pour autant avoir une vision, un objectif commun. L’idée est de faire en sorte que tout le monde puisse travailler dans une même direction pour être plus visible, donner encore plus de sens à l’action collective, et surtout tenir compte des contraintes des autres.

Les entreprises

Les excès du capitalisme ont fait et font toujours beaucoup de mal à l’image de l’entreprise. Ainsi, une barrière de méfiance et de peur légitime de la récupération vient empêcher le dialogue et la construction collective entre des citoyens et des créateurs d’activité. Pourtant, ce n’est pas le fait d’avoir une activité rémunératrice qui est malsain, c’est l’asservissement d’une majorité par une minorité qui mène à l’exclusion, aux luttes de classes et au sentiment d’injustice.

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Seulement voilà, nous avons besoin d’un tissu économique et de compétences pour permettre à une population d’avoir du pain, de faire réparer les systèmes de chauffage, de fabriquer des vêtements, d’être soignée etc …

Or, le système économique actuel est très vulnérable à la raréfaction des ressources et la vie d’une majorité de la population de nos pays industrialisés dépend des emplois que ce système génère. C’est pourquoi les entreprises ont un rôle majeur à jouer dans la préparation de cet avenir sans pétrole.

Quelques objectifs pour les entreprises:

  • intégrer le fait que la croissance stable et constante n’existera plus. C’est certain. Partant de ce constat, c’est leur intérêt d’anticiper le changement du modèle économique, afin de déterminer comment il leur est possible de fonctionner sans prévision de croissance permanente du marché.

 

croissance habituelletendance de l'économie jusqu'à présent (source: Erik Towsend)

croissance a venirtendance de l'économie à l'avenir (source: Erik Towsend)

  • se poser la question de l’utilité de chaque activité, dans un monde où l’énergie et les matières premières abondantes et peu chères n’existent plus.

Je fabrique des coques en plastique pour téléphones portables et destinées à l’exportation : mon activité est-elle pérenne ?

Mon activité dépend de transports internationaux quotidiens : cette situation est-elle durable ?

La population locale ne dispose pas, sur place, de certaines compétences dont elle aura absolument besoin : comment pourrais-je élargir les activités de l’entreprise pour répondre à ce besoin local ?

Ce que je fabrique n’est pas absolument nécessaire : mon entreprise est-elle assurée d’avoir des clients en période de crise ? 

  • aller dans le même sens que les initiatives de transition. Les entreprises doivent proposer des solutions techniques durables et efficaces, qui pourront répondre aux demandes des citoyens dans un souci d’équité et de solidarité (Économie sociale et solidaire). Elles doivent mieux répartir les services géographiquement pour limiter les transports, s’impliquer dans la mise en place de monnaies complémentaires locales, préférer la résilience à l'économie d'échelle, participer financièrement aux initiatives de la collectivité …

Les élus

Au niveau local, les élus ont généralement le souci de répondre, à court terme, aux attentes des citoyens, que celles-ci soient raisonnables ou non, durables ou non, équitables ou non et même si cette réponse passe par de la démagogie, du populisme ou de la promesse impossible à tenir.

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Comme je l’expliquais plus haut, il faut que les citoyens comprennent la nécessité du changement pour pouvoir en accepter le principe. Si, sur un territoire, une majorité de citoyens s’implique dans le changement profond des modes de vie, alors l’équipe municipale ne pourra pas l’ignorer et devra se positionner en soutien si elle ne veut pas sauter lors du prochain passage aux urnes.

Tant qu'une partie trop importante de la population attendra des élus qu’ils leurs fassent des promesses intenables, effectivement rien ne sera possible. Mais les élus ont la clé des territoires, ils ont toutes les données globales, la possibilité d’investir, de réglementer, de réunir, de communiquer. Les élus ont entre les mains des outils indispensables pour faciliter et accélérer les changements profonds, notamment en ce qui concerne les réseaux de distribution et de transport, les services publics, l’aménagement du territoire et l’incitation réglementaire et fiscale.

Il faut pouvoir compter sur les pouvoirs publics pour soutenir l’initiative citoyenne dans le cadre de la transition. Pour cela,c’est d’abord le citoyen qui doit se mobiliser afin de rendre le changement inévitable aux yeux de tous … et donc des élus.

Quelques objectifs pour les élus :

  • utiliser les moyens disponibles pour démultiplier la sensibilisation de la population par l’organisation de conférences, de projections de films et de débats.
  • mobiliser les citoyens lorsque des choix doivent être faits, afin de pouvoir construire le territoire et les conditions de vie que les habitants souhaitent pour demain.
  • évaluer la capacité du territoire à faire face à la raréfaction des ressources (bilan résilience) et prendre des décisions concertées allant dans le sens de l’amélioration de la résilience. Les orientations règlementaires et fiscales qui seront prises devront permettre une évolution dans le bon sens des pratiques et du tissu socio-économique local.
  • apporter un soutien matériel, administratif et financier aux initiatives citoyennes.

 

indice-resilience.jpg représentation en étoile du niveau de résilience du territoire, suivant 6 critères


En bref ...

Sur tous les territoires il y a des riches et des pauvres, des entreprises et des associations, des bénévoles et des salariés, des électeurs de droite et de gauche, des croyants de toutes religions, des femmes et des hommes, des ouvriers et des patrons, des piétons et des automobilistes, des citoyens et des citoyens élus, des vieux et des jeunes ... et toutes ces personnes vont vivre les immenses conséquences du pic pétrolier.

Aujourd'hui, je veux lancer une initiative de transition dans ma ville et la diversité ne peut être qu'un atout. Si mes voisins ont compris le problème et qu'il veulent retrousser les manches avec moi, quelle que soit leur "catégorie" ... alors BIENVENUE !


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