Une brève histoire du pic pétrolier
C'est en 2004 que la production de pétrole conventionnel a commencé à plafonner. L'ensemble des producteurs ont, à l'époque, été incapables de répondre à l'explosion de la demande de l'Inde et de la Chine notamment. Notons que la consommation de ces deux pays a été multipliée par 3.5 entre 1994 et 2014, passant de 4.3 à 14.9 Mb/j.
, la production mondiale de pétrole conventionnel stagne entre 70 et 74 Mb/j, avec deux pays seulement pour compenser le déclin des autres: l'Arabie Saoudite et l'Irak.
Pendant toutes ces années, la dette des pays importateurs a augmenté de manière incontrôlable, quasi proportionnellement à la facture énergétique. C'est le cas en Europe où la dette a doublé en dix ans, passant de 6 000 milliards € à 12 000 milliards €, comme aux États-Unis où elle a triplé. De l'autre côté, l'Arabie Saoudite, a capitalisé plus de 750 milliards $ à elle seule.
L'effondrement de 2008, lié à la bulle des subprimes, était la première convulsion liée au syndrome du peak oil ! Pour la première fois, le système économique était mis à nu, montrait les folies dont il était capable, restait au tapis sous la contrainte physique d'un pétrole devenu trop rare.
Cependant, les banques ayant désormais l'immense pouvoir de créer de l'argent sans limite par le biais du crédit, elles permettent à l'économie de croître artificiellement et d'aller chercher des ressources que l'Homme aurait dû laisser dans le sol par manque de moyens pour se les offrir. Les banques sont donc devenues indispensables pour garder la tête hors de l'eau et c'est pour cette raison que leur survie est plus importante que celle des peuples. On les sauve donc sans condition et ça repart de plus belle.
C'est alors que les hydrocarbures non conventionnels entrent en scène ! En quelques années seulement, avec un prix du baril supérieur à 100$, leur production augmente sans contrôle, bien plus vite que la demande. Entre 2010 et 2015, la production de sables bitumineux augmente de 45% au Canada, celle du pétrole offshore ultra-profond du Brésil augmente de 25% et celle du pétrole de schiste aux États-Unis augmente de 75%. En tout, ce sont 5 à 6 Mb/j supplémentaires qui sont mis sur le marché grâce à la spéculation et la dette, auxquels s'ajouteront la hausse de production de l'Arabie Saoudite qui entretien la guerre des prix et désormais l'Iran. Tout ceci conduit à l'effondrement des cours que nous connaissons à l'heure actuelle, mais je ne reviendrai pas ici sur les gagnants et les perdants de cette situation.
Pendant ce temps, le chômage est endémique et les manipulations statistiques peinent de plus en plus à masquer l'incapacité des gouvernements à reprendre le contrôle de la situation. L'arrivée de ces nouveaux hydrocarbures ne change rien à la catastrophe sociale qui s'amplifie. En France, le nombre de chômeur a augmenté de 60% depuis 2008 et aucun des grands partis politiques ne semble vouloir traiter le problème à la racine.
Voilà plus de quarante ans que le club de Rome a alerté le monde sur les limites physiques de la biosphère, mais un grave handicap de la perception semble affecter certains technocrates qui pensent encore que la construction d'un aéroport sur une zone humide, juste après la COP21 et en période de choc énergétique majeur, va améliorer le sort des populations. Ce sont malheureusement ces victimes de troubles graves qui nous gouvernent aujourd'hui.
La stratégie du choc
Naomi Klein, présente en France pour la COP21, présente sa vision de la gestion des manifestations par l'État français
Désormais, tous les moyens sont bons pour ne pas traiter les vrais problèmes et tenter à tout prix de maintenir ce système, dont il suffirait de couper le respirateur artificiel pour qu'il succombe. Nous continuerons à endetter les pays importateurs de pétrole quand son prix est élevé, et endetter les pays producteurs et les compagnies pétrolières quand son prix est bas. Nous continuerons à générer du chômage, de la pauvreté, des riches toujours plus riches, des désastres environnementaux ... jusqu'à l'éclatement des bulles, jusqu'au krach.
Théoriquement, il est toujours possible de sortir par le haut si nous sommes solidaires, résilients, imaginatifs, tolérants. Mais le pic des libertés ou "peak freedom" que nous venons de passer nous entraîne dans un déclin qui pourrait restreindre le champ des possibles. Restons vigilants, restons conscients, restons libres !
NB: Suite à certains commentaires, j'ai modifié des éléments de la première partie de l'article au sujet de la production de pétrole conventionnel. Merci pour votre vigilance bienveillante, continuez à commenter et à partager !